De 1946 à sa disparition le 10 mai 1947, le M.D.R.M. a connu un succès considérable grâce à ses atouts qu’il a su profiter : appui de ses parlementaires, absence de réaction rapide et sérieuse de la part de l’administration contre lui et qui aurait, certainement, pu empêcher son développement – les autorités françaises pensent qu’il constitue une structure crédible pouvant représenter les Malgaches et jouer le rôle de soupape de sûreté.
Mais cette réussite est également à mettre au compte de l’habilité et de la vitalité du parti et de ses militants pendant leur campagne de recrutement et de propagande. Ainsi, en un peu plus d’une année d’existence, le M.D.R.M. se renforce, étoffe sa base et affirme ouvertement sa force grandissante qui se traduit par sa forte pénétration au sein de la société et dans tous les domaines (économique, social, culturel).
La province de Tananarive : une région à forte implantation nationaliste Depuis le début de la colonisation, la région des Hautes-Terres et en particulier la province de Tananarive était toujours un bastion du mouvement d’émancipation.
Ainsi, au lendemain de la création du M.D.R.M. et de son implantation à Madagascar, des nombreuses sections du parti nationaliste se forment dans la province centrale. A part les puissantes sections de Tananarive-ville ou d’Antsirabe, le parti est présent même dans les petites localités. Ainsi, le district de Betafo possède six sections de près de 650 membres, le poste de Faratsiho en a sept, tandis que les cantons d’Ambohibary Sambaina, Soanindrariny, Belazao, Vinaninony renferment respectivement sept, cinq, trois et trois sections du M.D.R.M.
Propagande en milieu rural
Le discours du parti de la rénovation varie suivant les milieux concernés et les personnes visées. En brousse, il insiste plus sur les exactions, les oppressions et les institutions arbitraires ainsi que le caractère abusif et injuste du système colonial dont la solution n’est autre que l’adhésion au M.D.R.M.
Le M.D.R.M. utilise et exploite habilement le mécontentement populaire consécutif aux souffrances provoquées par la guerre et l’effort de guerre, la pénurie, le marché noir, l’inflation… ainsi que l’effondrement du pouvoir d’achat et la difficulté socio-économique qui contrastent avec la liberté politique franchement acquise.
Après et grâce à l’abolition des institutions oppressives tels que l’indigénat et le travail forcé, la population ose de plus en plus exprimer son mécontentement et ses revendications. Ces dernières sont généralement axées sur la nécessité d’une réforme socio-économique dans le but d’améliorer le bien-être de tout un chacun.
L’indépendance même n’est voulue que parce qu’elle est vue comme une solution efficace contre ces problèmes socio-économiques qui ont des répercussions sur le quotidien des Malgaches. Ainsi, on peut dire que le succès du parti, surtout dans les campagnes, provient de la conjonction de son programme au besoin immédiat des Malgaches.
Une autre manifestation de l’habilité du parti est l’utilisation de la structure sociale traditionnelle et son recours systématique à des formules ou des institutions dont les poids sociaux sont lourds de signification : le Fihavanana, l’entraide, le secours mutuel… Pour promouvoir une telle stratégie, des différentes sections locales créent des coopératives qui aident les gens à se procurer certains produits de première nécessité. Ces coopératives assurent aussi des revenus réguliers aux paysans en achetant leurs produits à un produit raisonnable. Quant aux sections du M.D.R.M., elles se présentent comme des associations d’entraide et à but philanthropique, d’où leur franc succès dans certaines régions comme justement le district d’Ambatolampy et d’Antsirabe.
La propagande en milieu urbain
Dans les villes, le parti de la rénovation adopte une stratégie, certes assez similaire, mais spécifique au milieu.
Dans les centres urbains et parmi les gens lettrés, le M.D.R.M., tout en dénonçant les abus de l a colonisation et tout en réclamant des réformes, adopte un type de propagande beaucoup plus savant et de forte connotation intellectuelle, et qu’il utilise avec l’aide des arguments souvent tirs des idées des grands philosophes (Rousseau…) et de certaines personnalités étrangères importantes (Général de Gaulle, Roosevelt, Gandhi…).
Dans les villes (comme dans les villages ruraux), dans le but de mieux atteindre la population, le M.D.R.M. entreprend un travail à la base et qui se révèle être très efficace. Il déploie des associations rattachées à ses sections locales (jeunes, femmes…) pour inculquer au sein de la population à majorité illettrée un minimum de culture politique : on explique les grandes lignes de la politique du parti, la légitimité de la revendication de l’indépendance, les grands bouleversements de l’après-guerre, l’Union Française…
Alexandre L.
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