Sunday, February 25, 2007

Histoire • Référendum pour la modification de la Constitution

Entre deux propositions, après le «A» ou «B» des dirigeants, le peuple doit élire «oui» ou «non»

Un référendum est une consultation populaire à l’initiative des dirigeants ou du peuple lui-même, selon les pays et les modalités prévues par la constitution. Il permet d’obtenir un aval de la population pour un sujet important dans la vie de la collectivité . Les électeurs, lors d’un référendum, répondent par « oui » ou « non » à une question. Il faut en cela le distinguer du plébiscite, qui est l’approbation ou non d’une personne.

A quoi sert un référendum ?

Le référendum est une procédure de vote permettant de consulter directement les électeurs sur une question ou un texte, qui ne sera adopté qu’en cas de réponse positive. Le référendum est donc, avant tout, un instrument de « démocratie directe » car il permet au peuple d’intervenir directement dans la conduite de la politique nationale.

Histoire des référendums à Madagascar

Pour ne pas chercher midi quatorze heures, osons le dire, que le « Oui » l’a toujours emporté.Bientôt, les citoyens malgaches majeurs voulant –et pouvant- voter, vont aller aux urnes pour la première fois en cette année 2007. A cet effet, les listes électorales, qui ont été très critiquées lors des élections présidentielles du 3 décembre 2006, font l’objet de rigoureuses révisions de la part des responsables administratifs.

Sept référendums en 50 ans

Le premier referendum jamais organisé à Madagascar a eu lieu le 28 septembre 1958. Il s’agissait, pour les Malgaches, et de la part du gouvernement français, de déterminer par un « oui » ou par un « non », si la Grande île devrait devenir une république autonome au sein de la communauté française. Le « Oui » l’emporta largement et, le 27 avril 1959, Philibert Tsiranana, fut élu premier président de la première République de Madagascar.

L’exception guinéenne

Sur toutes les anciennes colonies de la France en Afrique, qui avaient l’objet de la même consultation, seule la Guinée de Sékou Touré avait voté « non », ayant préféré l’indépendance directe. A Madagascar, c’est le parti AKFM (Parti du Congrès de l’Indépendance de Madagascar) du pasteur Richard Andriamanjato, l’homme pratiquant la politique à géométrie variable, qui avait fait voter « non » et avait obtenu 25% des voix à ce referendum « inaugural ».

Le second référendum malgache a été organisé le 8 octobre 1972, suite aux événements du 13 mai. La révision des accords de coopération franco-malgaches, la malgachisation de l’enseignement très très mal préparée ainsi que la sortie de la zone franc du Franc Malgache de Garanti, actuellement Ariary fut au sujet de cette élection. Le troisième référendum fait suite à l’assassinat du colonel Richard Ratsimandrava, le 11 février 1975 et à l’instauration d’un directoire militaire dont les survivants se comptent sur les doigts de la main de nos jours. Parmi eux, un certain officier de marine, Didier Ignace Ratsiraka, qui avait été ministre des Affaires étrangères du général Ramanantsoa.

Ainsi, le 21 décembre 1975, les Malgaches avaient à se prononcer pour ou contre une nouvelle constitution entraînant une seconde république. A plus de 90%, le « oui » l’emporta amenant à l’avènement de la République démocratique de Madagascar.

Plus de 150 partis

C’est le début de la seconde république. En décembre 1989, changeant de cap, l’Amiral Didier Ratsiraka fait amender la constitution dans le but de permettre la libre formation des partis politiques, sans toutefois passer par un référendum . Est donc adoptée la loi n° 89-28 du 29 décembre 1989 portant révision de la Constitution du 31décembre 1975 de la République démocratique de Madagascar. Résultats ? De nos jours, il existe plus de 150 partis et autres particules à Madagascar.

Le quatrième référendum est l’aboutissement des événements de 1991, particulièrement la tuerie du 10 août aux abords du palais d’Iavoloha toujours impunie. Après l’existence d’un gouvernement parallèle puis l’instauration d’un gouvernement de transition (Haute Autorité de l’Etat), les Malgaches doivent se prononcer pour un changement d’une constitution élaborée par un forum national.

Le « oui », avec encore plus de 90%, l’emporte largement le 19 août 1992. Le 27 mars 1993, le professeur Albert Zafy, l’homme au chapeau de paille, après avoir battu Didier Ratsiraka au second tour des élections présidentielles (25 novembre 1992 et 10 février 1993), est investi premier président de la troisième république de Madagascar. Mais dès 1994, des conflits avec son Premier ministre, Maître Francisque Ravony (élu par l’Assemblée le 10 août 1993) se multiplient.

La constitution de l’époque lui interdisant de révoquer lui-même le Premier ministre, le président Zafy va organiser le cinquième référendum de l’histoire de Madagascar. Il s’agissait d’une révision ou plutôt d’une modification de la constitution en ce sens. Ainsi, le 17 septembre1995, le « oui » à 72,28% du peuple l’autorise à révoquer et à nommer le Premier ministre.

Vers l’empêchement du Pr. Albert Zafy

A partir de février 1996, une coalition de l’opposition s’organise pour obtenir le départ du président Zafy. Elle trouve des relais au sein de l’Assemblée et, en mai, le gouvernement Rakotovahiny est renversé par une motion de censure. Le président Zafy va accepter de nommer le Premier ministre proposé par l’Assemblée, Norbert Lala Ratsirahonana mais tentera d’imposer ses proches au sein du gouvernement. Cela, doublé de ses financements parallèles « anti-Bretton Woodiennes », lui sera fatal et, le 26 juillet, une résolution prononcera son empêchement.

Le président Zafy, sera officiellement destitué le 5 septembre 1996. Norbert Lala Ratsirahonana, fondateur du parti AVI cumulera momentanément et le poste de chef d’Etat et celui de chef du gouvernement. Le 3 novembre, il organise de nouvelles élections présidentielles. Un second tour sera nécessaire, le 29 décembre 1996, qui verra la victoire et le retour aux affaires de l’Amiral Ratsiraka qui bat Zafy. Ce sera la IIIème république seconde partie.

Le dernier sursaut de l’AREMA

En deux temps, trois mouvements, le fondateur de l’AREMA, devenu l’Avant-garde du Renouveau de Madagascar, ira renforcer ses pouvoirs. Le 5 mars 1998, il organise le sixième référendum de l’histoire de Madagascar, pour modifier l’ancienne Constitution.

Comme à l’accoutumée, le « oui » l’emporte, même si c’est de justesse avec 50,96% des voix exprimées, et l’ordonnance 98-001 du 9 avril 1998 est adoptée. Elle tient lieu de loi organique fixant les modalités des élections législatives qui ont eu lieu le 17 mai 1998. Par ailleurs, alors qu’il avait fait disparaître le Sénat de la 1ère république, durant tout son mandat d’avant Albert Zafy, l’Amiral a remis sur le tapis cette Chambre haute.

A la rescousse des « anciens » ?

Le prochain référendum , qui sera donc le septième que Madagascar aura connu, constituera, en fait, le troisième portant sur une révision de la constitution après ceux de septembre 1995 et mars 1998 donc. Selon le comité préparatoire -dirigé par Noël Rakotondramboa, actuel Grand Chancelier, entre autres fonctions, et Honoré Rakotomanana, sénateur en fin de mandat et juriste, « arémiste » de la première heure, il ne s’agira pas d’aller vers la IXème république mais plutôt de « faire des modifications ».

Si l’on se réfère à l’histoire, le « oui » risque de l’emporter encore une fois. Le peuple en sera-t-il enfin conscient mais, depuis, toute révision, tout toilettage n’a fait que renforcer le pouvoir des très hauts commis de l’Etat.

Quels changements ?

Si changements il y a, et il y en aura, ils pourraient déjà porter sur la suppression du Sénat -doublon donc budgétivore- et de l’autonomie des provinces . Et, au nom du MAP (Madagascar action plan), nous doutons fort qu’il y ait un vrai et authentique débat public, faute d’une opposition qui ne joue ni ne connaît son rôle. Surtout qu’à Madagascar, l’adage « nul n’est censé ignoré la loi », se traduit au quotidien par la fondamentale ignorance de la majorité des Malgaches de leur loi… fondamentale.

Par ailleurs, comme les voies du Seigneur sont insondables, les réactions du président Marc Ravalomanana sont toutes aussi imprévisibles. Mais si c’est au bénéfice de la majorité, alors tant pis pour ses détracteurs inTIMidés et dont la devise demeure « Moi, ma famille, ma patrie ».

Recueillis par Daddy R.

Wednesday, February 21, 2007

Réflexions et remarques relatives à l’idée de modification de la Constitution

En tant que loi fondamentale, la Constitution est la pierre anguIaire de l’édification de l’Etat, compris, dans sa fonction normative de l’organisation de la société. Elle s’impose aussi bien aux gouvernants qu’aux gouvernés.

La Constitution est par ailleurs foncièrement l’expression du dynamisme de la société, dans l’accomplissement de son destin. En ce sens, autant pour se conformer aux normes universellement reconnues, que pour répondre aux particularités propres à Madagascar, la Constitution - apparait comme la reconnaissance de la diversité des composantes du Peuple reflète la volonté d’unité pour une Nation à construire;
- est l’expression du respect de l’égalité entre les Malgaches;
- assure et assume la protection des libertés: des personnes, des initiatives, des biens, des capitaux et des informations - vise à assurer la répartition équitable du revenu national;
- constitue l’affirmation du partage équitable et équilibré du pouvoir comme une nécessité fondamentale du développement économique et social harmonieux.
A ce titre
Cinq principes fondamentaux devraient régir la conception et la rédaction de la Constitution :
- la conception républicaine de l’Etat ;
- la laïcité de l’Etat;
- la Démocratie
- la séparation et l’équilibre des pouvoirs;
- la décentralisation. De l’examen des propositions émises par le régime actuel : Les médias d’Antananarivo ont publié un document relatif aux propositions de modifications que le régime envisage d’apporter à la Constitution en vigueur. Officiellement et jusqu’à ce jour, le régime n’a daigné ni le confirmer ni l’infirmer. Selon l’adage « qui ne dit mot consent », force est d’admettre son authenticité.

Des remarques de fond s’imposent au regard de la gravité des propositions du régime. Sur le projet de modification des conditions d’éligibilité du Président de la République: Le projet viole fondamentalement la Constitution, en apportant des restrictions importantes aux droits des citoyens prévus par le Préambule, I’article 10 et l’article 15.

Par ailleurs l’obligation de résidence fixée « de six mois au moins » sur le territoire national est en contradiction flagrante avec l’Article 12 de la Constitution .

Sur le projet de suppression du Sénat ou de réduction du nombre de ses membres
Le bicamélarisme est l’un des fondements de la démocratie dans le monde contemporain, et une manière de fàire participer à la vie nationale, aussi bien l’ensemble de la population que les collectivités territoriales et les organisations parties prenantes à la vie politique et au développement économique, culturel et social.

En outre, I’existence du Sénat est structurellemelit en phase avec l’Article 2 de la ConstitUtion qui précise que : Les provinces autonomes adoptant chacune sa loi statutaire sont : Antananariro Antsiranana Fianarantsoa Mahajanga Toamasina et Toliara, Article que conforte l’idée de base de la Constitution, en son Article premier : Le Peuple Malagasy constitue une Nation organisée en Etat souverain et laïc fondé sur un système de provinces autonomes dont les compétences et les principes de gouvernement sont définis et garantis par la Constitution.

Si l’Assemblée Nationale est l’émanation institutionnelle de la volonté du Peuple, le Sénat est l’expression institutionnelle de la vitalité des collectivités territoriales décentralisées, notamment les Provinces autonomes. Cette dualité fonctionnelle, constituant par ailleurs une garantie de l’équilibre des pouvoirs, est remise en cause dans le projet.

Sur le projet de réduction du pouvoir de l’Assemblée Nationale
Autant dans l’idée de réduire le nombre des députés, de même que dans le projet de « disqualification » du titre de député en « député de région », comme la volonté affichée de supprimer l’immunité parlementaire, enfin avec l’idée de marginalisation et d’exclusion que constitue l’obligation de « résidence dans la circonscription électorale », on constate un recul nctoire, aussi bien historique, épistémologique que politique.

Il faudrait comprendre que dans tous les pays démocratiques dignes de ce nom, la représentation parlementaire est toujours proportionnelle au nombre d’habitants. Tel ne serait plus le cas dorénavant. En outre en disqualifiant le député, représentant national en « député de région » le régime disqualifle par voie de conséqtience, I’lustitution Nationale qu’est l’Assemblée Nationale I’obligation de résidence de tout candidat à la députation dans la circonscription de candidature, porte atteinte non seulement à l’Article 12, alinéa 2 de la Constitution mais aussi à l’endroit du « Pacte International relatif aux droits civils et politiques », et à l’article 13, paragraphe I et 2 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples déjà introduits dans le dispositif législatif de la République de Madagascar.

Sur la suppression des provinces autonomes
L’originalité essentielle de la Constitution en vigueur procède d’une nouvelle philosophie, consacrée par elle dans ses articles I et 2 notamment, et dans 1’ensemble du TITRE IV particulièrement, qui consistc à faire participer l’ensemble de la communauté nationale à son desth~ et son devenir, et cette philosophie trace une démarche hatitement spécifique de solidarité nationale, dans l’article 139 de la Constitution, lorsqu’elle déclare que: Dans le respect du « Filravanana », en vue de l’examen des questions d’intérét commun entre le pouvoir central et une ou rles provinces autanomes, entre deux ou plusieurs provinces autonomes, le Président de la République peut réunir une Conférence interprovinciale à laquelle participent notamment le Premier Ministre, les Membres du Gouvernement, les Gouverneurs, les membres des Conseils de Gouvernorat intéressés. Les Présidents du Parlement et des Conseils provinciaux des provinces autonomes ou leurs représentants assistent de droit à la Conférence. En supprimant les Provinces autonomes, le régime modifie les principes fondamentaux de la Republique de Madagascar.

Il n’est plus question de révision mais de changement de Constitution. On s’achemine de facto vers la Quatrième République. Seul Ie projet de modification de l’organisation et du fonctionnement de la Justice La suppression de l’luspection générale de la Justice de même que le Conseil Nationai de la Justice signifierait uniquement que l’organisation et l’ossature de la justice à Madagascar sont purement et simplement bafouces. Le projet de suppression est en contradiction avec l’Article 26 de la Charte Africaine des droits de l’homme et des peuples. En outre, c’est l’autorité même des juges qui est en cause, ceux-ci dès lors ne disposant plus de la latitude de juger sereinement en toute indépendance.

C’est par ailleurs la porte ouverte à l’arbitraire, d’autant qu’en introduisant des conditions incohérentes dans la nomh~ation des me,mbres de la Cour Suprême, le régime crce une situation éminemment conflictuelle. A la limite, le régime pourrait nommer des « juges stagiaires » comme Président et vice-président de la Cour Suprême.

Sur le projet de limitation et restriction du droit de grève
Un tel projet porte atteinte à plusieurs articles de la Constitution, mais qui plus est, le projet remet en cause les Conventions internationales ratifiées par la République de Madagascar (Pacte international relatif aux droits civils et politiques, différentes Conventions sous l’égide de l’Organisation internationale du travail).

Le recul de la démocratie est confirmé par le projet de suppression et restriction du droit de grève universellement reconnu.

Sur le projet de modification des Statuts particuliers des agents publics
Par ailleurs, en enlevant du domaine de la loi les Statuts particuliers des agents publics, le régime ne fait que rééditer sa pratique habituelle, de considérer les agents de l’Etat comme de simples personnels domestiques et non comme rouages essentiels de l’Administration publique. Ce caractère s’aggrave avec le dévoiement du fonctiomiement des secteurs de souveraineté.

L’Article 27 alinéa 2 de la Constitution, portant «contingentement par province dans le recrutement des agents de I’Etat « n’a jamais été respecté ». De plus, le recrutement à l’Académie militaire d’Antsirabe, à l’Ecole de la Gendarmerie nationale d’Ambositra, à l’école supérieure de la Magistrature et de la Police Nationale, est monopolisé au profit des persomies issues dans leur grande majorité d’une seule province. Contrairement à l’Article 40, alinéa 1, le principe de la neutralité des Forces Armées est loin d’être respecté. Les nominations aux hauts emplois militaires et de la police, I’avancement notamment aux grades de général, I’envoi des stagiaires à l’étranger ne reflètent pas l’« unité nationale », pourtant prônée du bout des lèvres, et sournoisement I’exclusion et la marginalisation s’institutionnalisent.

Conclusion

Il apparait à l’examen du projet, qu’on propose non « Une révision mais une modification profonde de la Constitution ». Tel que le régime envisage de « réviser », la Constitution, il apparait nécessaire :

1- de créer une Structure nationale constitutiomielle, aux lieu et place du Comité préparatoire pour la révision de la Constitution ;
2- de recourir aux forces politiques et sociales pour l’élaboration de la nouvelle Constitution ;
3- de prendre en compte les aspirations profondes des différentes composantes du pays, pour la forme et I’organisation de l’Etat ;
4- de soumettre au verdict populaire le projet constitutionnel ainsi conçu selon un tel processus.

Antananarivo, le 15 février 2007 AU NOM DU GROUPE DE REFLEXION POUR LE DEVELOPPEMENT (G.R.D.)Georges RuphinSamuel Ralaidovy